A 18 ans je quittais la famille, et commençais ma profession de soignante « armée d’un BEP Sanitaire et Social », d’abord en Clinique où j’ai eu le bonheur de faire un remplacement dans un Service de Maternité. J’ai vu éclore la Vie, j’ai vu naître et cela m’a donnée un élan pour la vie dans ma profession ! Après il a fallu cheminer dans la souffrance, service de cobalthérapie dans cette Clinique, souffrance physique et morale, mort. A l’Hôpital, la formation d’Aide-Soignante et la joie d’exercer ce beau métier depuis près de 40 ans ! J’étais alors postulante dans la Société des Filles du Cœur de Marie.
En 2016, cela fera 30 ans que j’accompagne des malades dans un service gérontologie, S.L.D. et quelle grâce pour moi… Tant de personnes rencontrées, le malade, sa famille, l’Equipe soignante. Toute une Equipe pluridisciplinaire au service de la personne… « Jusqu’à la mort accompagner la vie », et c’est la vie que nous accompagnons… Pour certains pendant de nombreuses années, 10 ans ou 17 ans, pour d’autres quelques jours…
Tant de personnes rencontrées. On me dit : « Je voudrais mourir ! ». Mais je répète à chacun que ma vie ne serait pas la même si je ne l’avais pas rencontré… Ma vie est riche de tous ceux que je rencontre… Tant de visages s’imposent à moi. Prendre soin de l’autre, mais laisser l’autre quelque part prendre soin de nous… « Je suis fatiguée, souriez-moi, cela me donnera du courage. » Ou la patience me manque… Ainsi chacun est utile à l’autre, jusqu’au bout prendre soin de la vie, le soignant et le soigné ! Je n’oublie pas l’Equipe, c’est une pierre d’achoppement parfois, mais aussi une aide puissante le plus souvent. Nous partageons joies et peines, tant de liens se tissent entre nous. Nous pleurons aussi parfois !
Je n’ai jamais eu d’apparitions, Dieu pour moi a le visage de ceux que je rencontre… Quelle tendresse avec Renée atteinte de la maladie d’Alzheimer ! Quel partage avec cette résidente de 64 ans, handicapée après un accident de la voie publique à 19 ans et qui vient de rentrer en Institution, ne pouvant maintenant vivre seule chez elle. Le deuxième jour après son arrivée dans le Service, je lui demandais ce qui l’intéresserait comme activité. Elle me répondit : « Pour moi la vie ce sont les relations, je crois que l’on a en nous une réserve d’énergie et d’amour. » Quel beau cadeau ainsi livré dans la confiance… L’aide-soignante, je crois, a la meilleure place, si proche de l’intime où Dieu se donne. Et je ne parle pas de la solidarité de l’Equipe dans les difficultés : deuils, accident du travail, peine…
Je ne parle pas des familles qui reviennent nous voir des années après le décès de leur parent, ou se proposent aussi comme bénévoles entrant avec nous autrement dans le ‘Prendre soin’…
C’est un métier merveilleux qui nous introduit dans le Cœur de Dieu !